Lutte contre la poliomyélite au Malawi : Un modèle de résilience et d’innovation

Introduction

En février 2022, un cas isolé de poliovirus sauvage de type 1 a provoqué une onde de choc au Malawi. Ce cas, celui d’un enfant de 14 ans à Ndirande, Blantyre, a conduit à un changement de stratégie, déplaçant l’accent de l’immunisation systématique des enfants de moins de 5 ans vers une cible plus large, englobant les enfants de 0 à 15 ans. Ce virus a été génétiquement lié à une souche identifiée deux ans auparavant dans la province du Sindh au Pakistan. Face à cette situation, une réaction rapide était essentielle. En moins de 24 heures, le président du Malawi a déclaré une urgence sanitaire nationale, et les activités de réponse ont été lancées sans délai.

Mobilisation des ressources et des partenaires

La réponse à cette crise a été orchestrée par le ministère de la Santé, avec le soutien de l’Initiative mondiale pour l’éradication de la poliomyélite (GPEI) et de ses partenaires. L’objectif principal était de combler les lacunes en matière d’immunité et de renforcer la surveillance pour détecter, contenir et stopper toute propagation supplémentaire du virus.

Campagnes de vaccination

Pour renforcer l’immunité communautaire, entre mars 2022 et septembre 2023, six campagnes de vaccination contre la poliomyélite ont été menées à domicile à l’échelle nationale, ciblant les enfants de 5 à 15 ans. Chaque campagne a montré une amélioration progressive, comme en témoigne le nombre de districts ayant réussi l’évaluation de la qualité des campagnes. Le succès de ces initiatives a été attribué à l’engagement des agents de santé, qui ont parcouru des collines et des distances considérables pour atteindre les communautés isolées.

Lusungu Gondwe, un assistant de surveillance de la santé au centre de santé de Chilobwe à Blantyre, a déclaré : « Notre objectif est de garantir que tous les enfants soient vaccinés. En plus de l’hygiène, c’est le seul moyen efficace de protéger nos enfants. La poliomyélite n’a pas de remède, et une fois qu’elle frappe, il n’y a pas de retour en arrière. Il est donc de notre devoir à tous, hommes et femmes, de veiller à la protection de nos enfants. »

Engagement des autorités sanitaires

Selon la ministre de la Santé, Hon Khumbize Kandodo Chiponda, leur engagement indéfectible a permis de s’assurer qu’aucun enfant ne soit laissé sans vaccination. Ces individus dévoués ont joué un rôle crucial dans la réponse, comme elle l’a souligné lors de son discours à l’Assemblée mondiale de la santé en mai 2024.

Renforcement des systèmes d’immunisation

Au-delà des campagnes, les systèmes d’immunisation de routine ont également été renforcés pour élargir l’accès à tous. Des sites de vaccination ont été établis, notamment dans des zones difficiles d’accès. Des mesures ont été mises en place pour garantir la continuité des services d’immunisation, malgré d’autres urgences en cours, telles que le choléra, la COVID-19, et les inondations liées au climat. Cela a inclus la fourniture de services d’immunisation dans des camps de personnes déplacées, des centres pour réfugiés et des sites de relocalisation temporaires.

Amélioration de la surveillance

Dr Neema Rusibamayila Kimambo, représentante de l’OMS au Malawi, explique qu’avec le soutien de l’OMS, de l’UNICEF et d’autres partenaires de la GPEI, des équipes internationales et locales ont été déployées à différentes étapes de la réponse pour combler les lacunes en matière de ressources humaines. Cela a permis de renforcer les processus de surveillance des maladies évitables par la vaccination.

Pour améliorer encore la surveillance, l’OMS a soutenu la mise en place d’un système de surveillance environnementale au Malawi. Ces sites ont été essentiels pour surveiller la charge d’entérovirus dans les échantillons d’eaux usées. La réponse a également impliqué une collaboration transfrontalière renforcée, en raison d’une épidémie simultanée au Mozambique. Grâce à une coopération intergouvernementale solide, des activités clés telles que des campagnes synchronisées et des réunions de surveillance transfrontalières ont été mises en place.

Innovations dans la réponse d’urgence

L’innovation a joué un rôle crucial dans la lutte contre la poliomyélite. Une supervision accrue au niveau des districts a permis d’améliorer l’efficacité des campagnes grâce à un système de suivi électronique en temps réel. L’UNICEF a également soutenu l’utilisation de drones pour livrer des vaccins dans des zones éloignées, comblant ainsi les lacunes géographiques.

L’Organisation mondiale de la santé a testé l’utilisation de systèmes de paiement numérique par mobile pour le remboursement des fonds d’activité destinés aux agents de santé. Cette plateforme a permis des paiements rapides, réduisant les transactions manquées et garantissant la motivation et la satisfaction des travailleurs de la santé.

Évaluation et succès

En mai 2024, une équipe indépendante d’évaluation de la réponse à l’épidémie de poliomyélite a déclaré, après deux évaluations sur le terrain et un examen de documents clés, que le Malawi et le Mozambique n’avaient plus de preuves de transmission du poliovirus sauvage (type 1). Cela a marqué la fin de l’épidémie dans toute la région africaine. Suite à cette déclaration, le gouvernement du Malawi a reçu une reconnaissance bien méritée lors de l’Assemblée mondiale de la santé.

Ce succès réaffirme une conviction intemporelle : là où il y a une volonté politique, une collaboration, un engagement communautaire, un soutien multisectoriel et des technologies innovantes, les résultats en matière de santé peuvent s’améliorer de manière significative. La victoire du Malawi contre la poliomyélite est un témoignage de dévouement et un phare d’espoir pour la santé mondiale.

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