Syndrome d’Auto-Brasserie : Une Maladie Rare et Complexe
Le syndrome d’auto-brasserie est une affection rare et multifactorielle caractérisée par la production endogène d’alcool due à une surpopulation de micro-organismes fermentaires, notamment des espèces de Saccharomyces cerevisiae et de Candida, ainsi que certaines bactéries comme Klebsiella pneumoniae. Même chez les individus en bonne santé, il existe un faible niveau de fermentation endogène qui ne suffit pas à provoquer une intoxication alcoolique. Ce syndrome est souvent lié à un régime alimentaire riche en glucides et peut également être influencé par des prédispositions génétiques, telles qu’un métabolisme de l’alcool inefficace. De plus, des associations avec le diabète, des maladies hépatiques, des troubles de la motilité gastro-intestinale et des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin ont été observées.
Abstinence et Cas Clinique
Un patient de 50 ans, originaire de Toronto, a consulté à plusieurs reprises le service des urgences pendant deux ans pour intoxication alcoolique, malgré des dénégations crédibles de consommation d’alcool. Pendant plusieurs années, cette personne avait cessé de boire pour des raisons religieuses, un fait confirmé par son mari et son fils. Elle a également présenté des épisodes récurrents de somnolence, s’endormant parfois lors d’activités quotidiennes comme la cuisine, ce qui a entraîné des chutes fréquentes.
Avant l’apparition de ces symptômes, le patient avait souffert d’infections urinaires répétées pendant environ cinq ans, traitées par des antibiotiques tels que la ciprofloxacine et la nitrofurantoïne. En raison d’une maladie de reflux, il prenait également du déxlansoprazole.
Visites aux Urgences et Diagnostic
Lors de ses visites aux urgences, le patient présentait un discours incohérent et une haleine alcoolisée, avec un taux d’alcool dans le sang atteignant 62 mmol/L. Il est important de noter que lors d’une de ses nombreuses visites, le patient a été admis involontairement en psychiatrie en raison de préoccupations concernant des comportements autodestructeurs, après avoir tenté de quitter l’hôpital avant une évaluation psychiatrique.
La léthargie et la somnolence, accompagnées d’une perte d’appétit, ont persisté pendant une à deux semaines, après quoi le patient est resté sans symptômes jusqu’à l’apparition d’un nouvel épisode un à deux mois plus tard.
Régime Alimentaire et Traitement
Ce n’est qu’à la septième visite aux urgences que le médecin a envisagé le syndrome d’auto-brasserie, prescrivant du fluconazole par voie orale et orientant le patient vers un gastro-entérologue. Ce dernier a recommandé un régime pauvre en glucides. Après un mois de traitement au fluconazole et quatre mois de régime, le patient était sans symptômes, mais la réintroduction des glucides a entraîné un nouvel épisode. Le traitement a été répété avec succès, et le patient a été référé à des spécialistes des maladies infectieuses. Après six semaines sans symptômes, le fluconazole a été arrêté en raison d’une élévation des enzymes hépatiques liée au médicament.
Les spécialistes ont prélevé des sécrétions gastro-intestinales par œsophagogastroduodénoscopie et coloscopie. Les cultures ultérieures n’ont montré aucune croissance microbienne, comme prévu après le traitement au fluconazole. De plus, un complément de probiotiques (Lactobacillus acidophilus) a été initié, et le patient a été conseillé d’éviter les antibiotiques à large spectre.
Le patient est resté sans symptômes pendant six mois, ce qui a conduit à un test de tolérance au glucose oral (avec 150 mg de glucose) et à des mesures de concentration d’éthanol à 0,5, 1, 2, 3, 4, 5, 24 et 48 heures. Les concentrations d’éthanol sont restées dans la plage normale tout au long de l’évaluation, permettant ainsi au patient de réintroduire progressivement un régime riche en glucides.
Importance d’un Diagnostic Précoce
Dans ce cas, la prise de déxlansoprazole et l’utilisation répétée d’antibiotiques ont probablement modifié la flore microbienne. Pour éviter des difficultés dans l’identification des espèces microbiennes responsables, il est recommandé de réaliser des diagnostics microbiologiques avant de commencer un traitement antifongique empirique.
Une approche thérapeutique interdisciplinaire, combinant un régime pauvre en glucides et un traitement antifongique, soit de manière empirique avec du fluconazole pendant trois semaines, soit en fonction des résultats microbiologiques, est privilégiée. Des traitements réussis par transplantation fécale ont également été rapportés.
Un diagnostic précoce du syndrome d’auto-brasserie est crucial, car les patients souffrent souvent d’une fatigue qui les empêche de participer pleinement à la vie sociale et professionnelle. Les conséquences légales, telles que la conduite sous l’influence de l’alcool, ainsi que des effets sur la santé comme la cirrhose du foie, doivent également être prises en compte.
Ce cas illustre que face à des intoxications alcooliques récurrentes, avec des facteurs de risque spécifiques tels qu’une utilisation multiple d’antibiotiques, un régime riche en glucides, certaines comorbidités et une dénégation crédible de consommation d’alcool, le syndrome d’auto-brasserie doit être envisagé pour permettre un diagnostic et un traitement précoces.