Les jésuites, tels que Jean de Brébeuf, provenaient de milieux privilégiés, satisfaisant leur désir d’aventure dans des contrées lointaines. Les Hurons les percevaient comme des naïfs, incapables de subvenir à leurs propres besoins.
Publié le 22 juillet 2024 • Dernière mise à jour il y a 1 semaine • Lecture de 8 minutes
Au début des années 1600, les jésuites ont tenté d’établir leur propre nation autour des Grands Lacs et de transformer la Confédération huronne (Wendat) en un modèle d’État jésuite. Le missionnaire Jean de Brébeuf était le mystique au cœur de ces efforts, vivant parmi un peuple qui peinait à s’adapter aux normes de l’ordre religieux qu’il représentait. L’ouvrage de l’auteur d’Ottawa, Mark Bourrie, Croisades dans le ciel : Jean de Brébeuf et la destruction de Huronia, est la première biographie séculière de Brébeuf. Voici un extrait du livre.
Contenu de l’article
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“Vers Huronia” (extrait du chapitre 2)
Au printemps suivant, Brébeuf et le Récollet Joseph de La Roche Daillon rencontrèrent des Hurons prêts à les conduire par la voie nordique en canoë jusqu’à la Baie Georgienne. Ils préparèrent leurs affaires, incluant des livres et des calices pour la messe, et voyagèrent ensemble pendant quelques jours le long du Saint-Laurent. Ils firent demi-tour en apprenant qu’un Récollet, Nicolas Viel, avait péri (ou avait été noyé), avec un jeune converti huron, dans la Rivière des Prairies lors de son retour d’Huronia. ils se lièrent avec des Hurons de confiance, et, avec le Père Anne de Nouë, commencèrent leur périple de trois semaines vers le nord-ouest, le 25 juillet, en suivant la route du canoë sur la rivière Ottawa. Leur hôte était un chef civil éminent, l’un des Hurons ayant un droit légal sur la route commerciale, car ses ancêtres avaient été les premiers Hurons à rencontrer Champlain.
Le voyage fut éprouvant. Brébeuf comprit rapidement que les Hurons n’étaient pas ses subordonnés, qu’ils ne ressentaient aucune obligation de prendre soin de lui, et qu’ils se souciaient peu de son arrivée dans leur pays. Il fut surpris de découvrir qu’ils s’attendaient à ce qu’il transporte lui-même ses bagages à travers les nombreux portages du trajet. Brébeuf avait beaucoup de bagages, et il lui arrivait parfois de devoir faire deux ou trois allers-retours pour les transporter d’un point de débarquement à un autre.
Les Hurons étaient absorbés par leur travail et parlaient rarement, même entre eux. Ils avaient beaucoup à faire : pagayer, porter des charges, s’enfoncer dans la rivière pour pousser les canoës contre le courant rapide et surveiller les raids iroquois. Ils devaient probablement se sentir très vulnérables jusqu’à atteindre le village de l’île Morrison, de leur allié occasionnel, Tessouat. Brébeuf ressentait son grand corps “coincé dans un canoë en écorce dans une position inconfortable, sans pouvoir se tourner d’un côté à l’autre, en danger d’être renversé ou de s’écraser contre les rochers cinquante fois par jour.”
Il poursuivit : “Pendant la journée, le soleil vous brûle. Pendant la nuit, vous risquez d’être la proie des moustiques,” écrivit-il après le voyage. “Vous pouvez parfois gravir cinq ou six rapides en une journée, et le soir, le seul réconfort est un peu de maïs écrasé entre deux pierres et cuit dans de l’eau claire. Le seul lit est la terre, parfois seulement sur des rochers rugueux et inégaux, et généralement sans toit autre que les étoiles, le tout dans un silence perpétuel.”
Il réalisa bientôt que les Hurons s’attendaient à ce qu’il termine tout travail qu’il avait commencé. S’il commençait à pagayer, il devait continuer. S’il portait un paquet à travers un portage, il ne pouvait pas le poser. Il n’y avait aucune déférence envers les prêtres simplement parce qu’ils étaient français ou clergé. Alors que la plupart des jésuites venaient de familles riches et étaient des enfants de privilège satisfaisant leur soif d’aventure dans des lieux étrangers, les Hurons les considéraient comme des idiots, incapables de communiquer, ignorants des forêts et des rivières, et incapables de se débrouiller seuls. Leurs visages et leurs corps étaient couverts de poils, ce qui confirmait leur stupidité. Les Hurons et les Algonquins voyaient un homme avec une barbe et s’exclamaient avec étonnement : “Oh, quel homme laid ! Est-il possible qu’une femme puisse porter un regard favorable sur un tel homme ?”
La Vie et les Défis de Jean de Brébeuf
Les Croyances et les Malentendus
Jean de Brébeuf, un missionnaire jésuite, a souvent été confronté à des idées fausses sur son apparence. De nombreux prêtres, y compris Brébeuf, arboraient des barbes, ce qui a conduit certains Français à tenter de convaincre les peuples autochtones que les femmes de France en avaient également. Cette croyance, bien que ridicule, a persisté jusqu’à l’arrivée de l’épouse adolescente de Champlain à Québec dans les années 1630. Les Hurons, quant à eux, pensaient que la barbe des Français entravait leur capacité à apprendre leur langue, les incitant à se débarrasser de leurs poils corporels pour atteindre un niveau intellectuel qu’ils considéraient supérieur à celui de leurs voisins.
La Vie Quotidienne des Hurons
La journée de travail des Hurons s’étendait sur quatorze heures, débutant par un petit-déjeuner composé de gruau de maïs et se terminant par un dîner similaire. Ce plat, connu sous le nom de sagamité, était un aliment de base pour les communautés vivant autour des Grands Lacs et dans les régions voisines du Bouclier canadien.
Les Déplacements et les Échanges
Les Hurons avaient l’habitude de cacher du maïs séché à des endroits stratégiques lors de leur voyage vers Québec, qu’ils récupéraient au retour. Brébeuf, pour sa part, payait pour sa nourriture avec de petits objets métalliques qu’il avait apportés. Les Hurons étaient pressés, transportant des centaines de kilogrammes de marchandises métalliques acquises à Québec, et désiraient rentrer chez eux rapidement. Ils prenaient cependant le temps de faire une offrande de tabac aux chutes de la Chaudière, qu’ils appelaient Asticou, avant de poursuivre leur chemin.
Les Conditions de Voyage
Les journées étaient chaudes et humides, et la rivière n’apportait guère de fraîcheur, amplifiant plutôt la chaleur du soleil d’été. Les nuits étaient pénibles, les moustiques le long de la rivière Ottawa étant si nombreux que certains voyageurs finissaient par être temporairement aveugles, leurs yeux étant enflés pendant des jours. En cas de blessure ou de maladie, l’isolement était un problème majeur, les villages étant éloignés les uns des autres. Un voyageur incapable de porter sa part de charge risquait d’être abandonné aux prédateurs.
Les Défis du Voyage
Malgré une diminution des attaques potentielles des Iroquois, le parcours restait difficile après avoir quitté l’île Morrison. Brébeuf devait franchir de longs portages sur l’Ottawa et entre les ruisseaux empruntés par les Hurons pour atteindre le lac Nipissing. Ce lac, habité par les Nipisseriens, offrait l’opportunité de rencontrer de nouvelles personnes et d’échanger des denrées alimentaires intéressantes. Ensuite, Brébeuf et les Hurons devaient naviguer sur le rapide fleuve français, avec encore plus de portages, avant d’atteindre la baie Georgienne et de passer quelques jours à pagayer à travers ses îles.
La Beauté du Voyage
Brébeuf a supporté les épreuves du voyage tout en s’émerveillant de la beauté de la vallée de l’Outaouais, avec ses escarpements de granit et ses vastes forêts de pins blancs. Il a trouvé une satisfaction profonde à surmonter les rapides et à escalader les rochers, se remémorant le Christ portant sa croix sur le chemin du Calvaire.
La Vie et l’Héritage de Brébeuf parmi les Hurons
Une Confrontation avec la Souffrance
Il est réconfortant de se tourner vers le crucifié dans les moments de détresse. Quelle source de consolation que de pouvoir se dire, même dans l’abandon, la maladie ou la famine, que l’on agit selon la volonté divine. Cette perspective offre une force intérieure face aux épreuves.
L’Arrivée des Jésuites en Huronie
Les missionnaires jésuites, dont Brébeuf et de Nouë, ont fait leur entrée dans le pays huron le 26 juillet 1626. Ils faisaient partie d’un groupe de 115 jésuites qui allaient s’établir dans cette région pendant un quart de siècle. Bien que la plupart d’entre eux ne soient restés qu’un ou deux ans, Brébeuf et quelques autres ont choisi de s’engager pleinement dans leur mission de conversion des Hurons.
Toanché : Un Centre de Vie et de Commerce
Brébeuf s’est installé à Toanché, un village situé près de l’extrémité nord de la péninsule de Penetanguishene. Toanché, l’une des principales localités de la Nation de l’Ours, qui est le plus grand partenaire de la Confédération huronne, se trouvait sur un plateau surplombant la baie Georgienne. Ce cadre magnifique offrait à Brébeuf une immersion dans une culture vibrante, où les habitants se peignaient le corps avec des pigments éclatants pour se présenter en public. Contrairement aux Petuns et aux Neutrals, les Hurons ne se couvraient pas de tatouages, bien que certains utilisaient des braises pour créer des motifs de cicatrices sur leur peau.
Les maisons de Toanché et des environs étaient ornées de couleurs vives, avec des bannières, des masques et d’autres sculptures accrochés près des portes. Les vêtements et les bijoux étaient teints et brodés avec des quills de porc-épic colorés, intégrant des plumes éclatantes dans le cuir souple. Les textiles, les paniers tissés et les nattes de roseaux étaient également embellis de couleurs vives. Ce village, avec ses vastes terres cultivées, offrait à Brébeuf un sentiment d’évasion de la nature sauvage.
Un Réseau Commercial Établi
Toanché est rapidement devenu un point de départ pour les commerçants français dans la région. Son chef civil, Aenons, avait établi un réseau commercial qui s’étendait du pays Neutre à l’extrémité ouest du lac Ontario, jusqu’à Québec et au nord vers le lac Supérieur. Champlain avait rencontré Aenons lors de son voyage en Huronie, alors qu’il était encore jeune. À cette époque, un Français, Étienne Brûlé, vivait déjà à Toanché, parfaitement intégré dans la société huronne. À l’arrivée de Brébeuf sur la plage de Toanché, Brûlé revenait d’un voyage au lac Supérieur avec un homme nommé Oumasasikweie, surnommé La Grenouille par les missionnaires. Oumasasikweie était probablement un commerçant Ottawa, connu pour ses visites fréquentes en Huronie.
Bien que Brûlé aurait pu être un atout précieux pour les jésuites grâce à sa connaissance de la géographie et sa maîtrise de la langue huronne, Brébeuf souhaitait qu’il quitte la région. Peu de temps après, Brûlé était de retour à Québec, préparant son retour en France.
Conclusion
L’histoire de Brébeuf et de son engagement auprès des Hurons est un témoignage de la rencontre entre deux cultures. Son expérience à Toanché illustre non seulement la richesse de la vie huronne, mais aussi les défis et les sacrifices que les missionnaires étaient prêts à faire pour leur foi.
L’Importance de la Préservation de l’Histoire Locale
La Valeur de l’Histoire
L’histoire locale joue un rôle crucial dans la compréhension de notre identité collective. Elle nous aide à établir des liens avec notre passé et à apprécier les luttes et les triomphes de ceux qui nous ont précédés. En préservant les récits historiques, nous garantissons que les leçons du passé ne soient pas oubliées.
Les Défis de la Conservation Historique
Cependant, la préservation de l’histoire locale n’est pas sans défis. De nombreux sites historiques sont menacés par l’urbanisation rapide et le développement économique. Par exemple, une étude récente a révélé que près de 40 % des bâtiments historiques dans certaines régions urbaines sont en danger d’être démolis. Cela souligne l’importance d’une action proactive pour protéger notre patrimoine.
Initiatives de Préservation
Des initiatives communautaires émergent pour contrer cette tendance. Des groupes de citoyens se mobilisent pour restaurer des monuments et sensibiliser le public à l’importance de la conservation. Par exemple, à Paris, un collectif a réussi à sauver un ancien théâtre de la destruction en organisant des événements culturels qui attirent l’attention sur son histoire.
L’Impact de la Technologie
La technologie joue également un rôle essentiel dans la préservation de l’histoire. Des projets numériques permettent de documenter et de partager des récits historiques avec un public mondial. Des plateformes en ligne offrent des archives accessibles, permettant à chacun de découvrir et d’apprendre sur son héritage culturel. En 2023, une application mobile dédiée à la découverte du patrimoine local a été lancée, attirant déjà plus de 100 000 utilisateurs.
Conclusion
En somme, la préservation de l’histoire locale est une responsabilité collective. En soutenant les initiatives de conservation et en utilisant la technologie pour partager nos récits, nous pouvons garantir que les histoires de notre passé continuent d’inspirer les générations futures. Il est impératif que chacun d’entre nous prenne part à cette mission pour protéger notre héritage culturel.