Technologie
Développement d’un avion à hydrogène liquide
La compagnie aérienne néerlandaise KLM s’est associée à la startup anglo-américaine ZeroAvia pour concevoir un avion turbopropulseur propulsé par hydrogène liquide. Les deux partenaires prévoient de réaliser une démonstration de vol entre deux aéroports encore non désignés en 2026.
ZeroAvia se spécialise dans la fabrication de systèmes de propulsion hydrogène-électrique pouvant être adaptés à des avions neufs ou déjà en service. L’entreprise a réussi à lever plus de 300 millions de dollars auprès de grands noms tels qu’Airbus, Amazon et British Airways pour concrétiser son projet d’aviation sans émissions.
Les moteurs hydrogène-électriques exploitent l’hydrogène dans des piles à hydrogène pour produire de l’électricité, qui alimente ensuite des moteurs électriques faisant tourner les hélices de l’avion. L’unique rejet de ce processus est de la vapeur d’eau.
ZeroAvia a déjà effectué plusieurs vols avec un petit avion à hydrogène équipé de son moteur ZA600. Ce dernier fonctionne à l’hydrogène gazeux. Cependant, le nouveau moteur ZA2000, alimenté par hydrogène liquide, représente un défi différent.
Collaboration pour l’innovation
En 2021, ZeroAvia a annoncé son intention de développer le moteur ZA2000, capable de propulser un avion de 80 passagers sur une distance allant jusqu’à 1 600 kilomètres. Ce moteur sera intégré à un turbopropulseur régional de grande taille, tel que l’ATR72 ou le Dash 8 400.
KLM jouera un rôle clé en aidant ZeroAvia à déterminer l’itinéraire de vol et à sélectionner les aéroports appropriés pour le décollage et l’atterrissage de cet avion plus imposant. La compagnie aérienne contribuera également à l’obtention des autorisations réglementaires nécessaires et à garantir un approvisionnement en hydrogène liquide. Les Pays-Bas se classent au deuxième rang des producteurs d’hydrogène en Europe, juste derrière l’Allemagne.
Les deux entreprises espèrent que ce vol de démonstration favorisera le développement d’avions à hydrogène à travers l’Union européenne.
Technologie des avions à hydrogène liquide
L’hydrogène liquide, bien plus dense que l’hydrogène gazeux, constitue un carburant de choix pour l’aviation. Toutefois, il ne se liquéfie qu’à des températures extrêmement basses, ce qui oblige ZeroAvia à concevoir des réservoirs cryogéniques coûteux capables de maintenir le carburant à des températures inférieures à -252,87 °C.
Plusieurs secteurs, y compris l’aérospatial, utilisent déjà des réservoirs cryogéniques pour l’hydrogène liquide. Par exemple, la fusée Ariane 6 en Europe utilise de l’hydrogène liquide pour ses lancements. Cependant, les exigences de sécurité pour les lanceurs spatiaux diffèrent de celles des avions commerciaux, qui doivent supporter des dizaines de milliers de décollages et d’atterrissages. Ces avions devront également conserver l’hydrogène à l’état liquide pendant de plus longues périodes.
Malgré les défis à surmonter, ZeroAvia a déjà réalisé des « tests avancés au sol » aux États-Unis et au Royaume-Uni pour le système ZA2000, y compris les réservoirs cryogéniques. Airbus, également actionnaire de ZeroAvia, développe ses propres systèmes hydrogène-électriques pour l’aviation.
La startup prévoit de commencer à commercialiser le système de propulsion ZA2000 en 2027, un an après le vol de démonstration prévu. Elle a déjà reçu plus de 2 000 précommandes pour ses systèmes ZA600 et ZA2000 de la part de compagnies comme American Airlines, United Airlines et la startup écossaise Ecojet.
Vers un vol sans émissions ?
Alors que les compagnies aériennes du monde entier cherchent à réduire leur empreinte carbone, plusieurs options s’offrent à elles. La technologie la plus avancée à ce jour est celle des batteries électriques. Cependant, les batteries actuelles ne sont pas suffisamment denses pour permettre aux avions de parcourir plus de quelques centaines de kilomètres.
Henri Werij, responsable de l’ingénierie aérospatiale à l’Université de technologie de Delft, a déclaré que les avions à hydrogène liquide pourraient potentiellement parcourir jusqu’à 4 000 kilomètres avec la technologie actuelle.
ZeroAvia affirme que ses systèmes de propulsion hydrogène-électriques permettront des vols sans émissions. Cependant, la propreté de ces avions dépend entièrement de la manière dont l’hydrogène est produit.
Actuellement, presque tout l’hydrogène est fabriqué à partir de gaz naturel, de charbon ou de pétrole. Seul 1 % de l’hydrogène est considéré comme « vert », produit par électrolyse à partir d’électricité renouvelable.
« Tout le monde présente l’hydrogène comme une source d’énergie propre, mais ce n’est tout simplement pas le cas actuellement », a déclaré Werij. « Beaucoup de ces affirmations dépendent d’une augmentation massive de l’offre d’hydrogène vert. »